il doit être trois heures du matin, peut-être quatre. j'ai passé toute la soirée avec des 'amies' dans un bar en ville. j'ai bu, un peu. mais je tiens tout de même toujours sur mes louboutins, alors ça reste bon signe. une fois que mon chauffeur me dépose devant la villa médicis, je marche, avec mon élégance habituelle, jusqu'à l'entrée. je m'apprête à ouvrir la porte mais je me souviens que je me suis fait les ongles plus tôt dans l'après midi. et il était hors de question que j'abime de si jolies mains. alors c'est naturellement que je sors mon portable pour composer ce même numéro que j'utilise dès que j'ai besoin de quelque chose. « toni, viens à l'entrée de la villa. tout de suite. » je ne lui laisse pas le temps de répondre que je raccroche. je me fiche pas mal qu'il soit en train de dormir, de faire quelque chose d'important, ou d'être en plein milieu d'une partie de jambes en l'air avec une paysanne de capri. il savait que s'il n'était pas là dans au moins cinq minutes, il pouvait dire adieu à ses rotules. et rien que l'idée d'avoir autant de pouvoir sur quelqu'un me plaisait énormément. à un point inimaginable, en fait. j'me sentais puissante, j'me sentais dans mon élément, tout simplement.

son sang s'enflamme, comme s'il avait troqué ses quelques globules rouges contre une rivière d'essence. comme si l'allumette l'avait frôlée d'un peu trop prêt, jusqu'à volontairement lécher le liquide inflammable. la sonnerie de son portable se répercute contre les murs de sa chambre, elle monte crescendo, un peu plus à chaque seconde, tuant ses quelques dernières doses de sang-froid. sa main tremblante s'aventure sur la table de nuit à la recherche de la source du bordel ambiant. il grogne, tourne légèrement dans ses draps. la musique atteint encore une octave. il. va. tuer. quelqu'un. ses doigts ne cessent de se refermer dans le vide, il jure entre ses dents. toni inspire profondément, jette son bras à l'aveugle, à l'autre bout du matelas, et bingo, sa paume s'écrase contre l'objet du mal. son doigt glisse sur l'écran, ouai- toni, viens à l'entrée de la villa. tout de suite. il se redresse difficilement. putain de mauvaise idée. il s'est à peine relevé sur ses avant-bras que son monde tourne déjà autour de lui. les objets qui l'entourent dansent devant lui et ce manège incessant l'empêche de se redresser directement. son sang pulse désagréablement dans ses oreilles, sa tête le tue et son ventre se tord désagréablement. tout va bien. il marmonne entre ses dents et se retrouve en tête à tête avec le bip du répondeur. il inspire à nouveau, abandonne son portable sur son oreiller et parvient à trouver le courage nécessaire pour se redresser sur le bord de son lit aux draps froissés. assis sur ses couvertures, tony enfouit sa tête dans ses mains. sa voix rauque, brisée, flirte avec les notes graves. putain. j'vais la tuer, j'vais la tuer, j'vais la tuer. il est encore sous l'emprise du sommeil et pourtant, il se lève, enfile un pantalon de jogging et un sweat qui traînaient sur le sol vert délavé de sa chambre. il attrape à la dérobée son paquet de clopes et s'échappe dans la dure réalité. il traverse le hall quasi désert en traînant des pieds, une clope déjà coincée entre ses lèvres dorées. il arrive à la hauteur de l'énorme porte vitrée et c'est là qu'il la voit. un sourire, faux, se glisse sur ses lèvres. il fait bien attention à franchir les derniers mètres qui les séparent le plus lentement possible. juste pour la forme. enfin, il sort dans la nuit glacée. qu'est-ce que tu veux? il s'adosse à une colonne de marbre, allume sa clope, crache la fumée dans son décolleté. un frisson le parcoure, il aurait dû mettre des pompes. il serre les dents. si j'me gèle les boules, c'est toi qui prends. ses lèvres s'étirent en un sourire en coin autour de sa cigarette. le jeu reprend.

elle a des airs de mante religieuse. ou de laxatif puissant. il lève un sourcil, imperturbable alors que le sac rose flashy, plus pailleté que le ciel, vient s'écraser contre son torse. goût de chiottes. il lève les yeux au ciel, ses doigts se referment autour de l'objet immonde. meuf, t'as besoin de deux trois cours de politesse... il penche la tête, l'observe de la tête aux pieds, tire une nouvelle taffe, et toujours ce sourire, comme une ombre, au coin de sa bouche. un homme passe devant eux, complètement inconscient du manège qui se trame juste à quelques mètres de lui. il les observe furtivement du coin de l'oeil. toni, par réflexe, relève le menton, le défie du regard. il a une fâcheuse tendance à s'attirer des emmerdes. partout, tout le temps. trop perdu dans sa pulsion machiste, il se rend compte, trop tard, de la main de la blonde qui lui arrache la cigarette des lèvres. il démarre au quart de tour. lui et sa nicotine, c'est fusionnel, une histoire qui dure depuis des années. c'est sacré. woah woah woah tu comptes faire quoi là? elle aspire la fumée saveur tabac, il tend la main, prêt à la récupérer sauf que gaïa tue sa seule source de répit. elle la jette à ses pieds, et puis la termine d'un coup de talon aiguisé. c'est pas cool, pas cool du tout. ok, ok. tu vas la jouer comme ça. d'accord. son ton est dur, il détourne le regard. au loin, les étoiles scintillent. t’inquiète pas, je vais te les réchauffer toute la nuit… il hoche la tête, les traits tirés. blasé. il a juste envie de retourner pioncer, c'était marrant y'a deux minutes mais là, elle a dépassé les bornes. il passe sa langue sur ses lèvres, surjoue un peu le geste. ouais, j'en doute pas. faut bien que tu montres ta vraie nature parfois. il passe une main dans ses cheveux, reporte son attention sur sa silhouette frêle et son sourire amer. … dans tes rêves, peut-être. il secoue la tête de gauche à droite, plonge sa main dans la poche arrière de son jean. c'est là que tu te plantes ma grande, heureusement que j'suis là pour t'apprendre la vie, qu'est-ce que tu ferais sans moi hm ? son paquet en main, il pioche déjà à l'intérieur du carton, il- maintenant arrête tes conneries et ouvre la porte. il inspire profondément, ouvre la bouche, s'apprête à répliquer, à l'envoyer chier. tu te fous de moi? et puis il se rappelle. eh merde. fais ça rapidement, j’ai pas de temps à perdre, je suis fatiguée. et tu dois m’accompagner jusqu’à ma chambre, les portes ne vont pas s’ouvrir toutes seules. il serre la mâchoire, ouvre la porte, esquisse une pseudo révérence quand elle passe devant lui. t'as pas besoin de tout ce cinéma pour me foutre dans ton lit gaïa. t'as juste à demander. il glisse son paquet dans sa poche, plus tard. sa main va se caler dans le bas de son dos, c'est l'histoire de quelques secondes, juste de quoi l'exaspérer. mais j'apprécie l'effort. il chuchote les derniers mots dans son oreille, un peu trop collé à elle. sa main descend sur ses fesses, quelques secondes, à peine le temps d'un souffle. et puis il passe devant elle, sans un regard en arrière. quel étage?

tu devrais dire ça à mon père, je suis certaine qu’il serait ravi d’entendre ce que tu penses de sa fille. sa mâchoire se contracte sous la dose d'adrénaline qui se déverse dans ses vaisseaux sanguins, son pou s'accélère, il redescend  sur terre. les dizaines de répliques qui lui brûlent les lèvres s'en vont mourir au fond de sa gorge. elle le tient captif, prisonnier. et tout ça pour une simple caisse. il aurait dû la laisser passer, il avait déjà bien gagné avec la lexus et la porsche du lundi après-midi. y'avait largement de quoi tenir encore deux semaines peinard. mais non. il ne laisse jamais une occasion s'envoler toni. jamais. sauf que cette fois-là, ça a été celle de trop. et maintenant, il en est réduit à jouer la pute de madame. le dialogue se fraie difficilement un chemin entre eux. c'est sinueux, dangereux, des couteaux lancés à la gorge et des poignards plantés dans la poitrine. il lui ouvre la porte à sa demande, se faufile à son tour dans l'hôtel, palpe son cul. rien d'anormal, la routine. c’est bien de garder espoir, ça fait vivre. mais parfois dans la vie il faut savoir abandonner. on ne mélange pas les torchons avec les serviettes. il rigole, un peu trop bruyamment pour que l'illusion soit complète. il est juste crevé, il a à peine dormi la nuit dernière et il comptait récupérer ses heures de sommeil perdues aujourd'hui. c'était non sans compter son altesse royale. on sait tous que les torchons sont beaucoup plus excitants ma belle. il marche devant elle, la laisse derrière, perchée sur ses talons d'un mètre de hauteur. ridicule. 4ème étage. son doigt frôle le bouton. il passe une main sur son visage, soupire longuement. tu dormais ? un léger sourire se dessine sur ses lèvres. va. te. faire. foutre. non, j'me remémorais notre dernière nuit ensemble. j'pense que j'me suis chopé une crampe à la main si tu vois ce que je veux dire. il la défie du regard avant d'essuyer sa main sur son pantalon, appuyant de cette façon ses propos. les portes s'ouvrent, il s'engouffre dans le piège, se retourne vers elle, lève un sourcil, et tend sa main vers elle, celle prétendue souillée, ça le fait sourire. l'expression qu'elle arbore vaudrait presque ses heures de sommeil égarées. ses joues se creusent un peu plus sous son sourire satisfait. bon tu te bouges, j'dois aller terminer ce que j'ai commencé.